L'Exposition Internationale des Arts et Techniques de 1937 est la dernière que Paris ait connue.
La plupart des pavillons des 42 pays représentés sont de style moderne, "rationnel", mais les pavillons de l'Allemagne et de l'URSS situés part et d'autre de l'axe du palais de Chaillot affirment l'un le "réalisme socialiste", l'autre "l'art national socialiste"(1).
C'est une confrontation ou les deux adversaires adoptent finalement un style similaire.
L'emplacement retenu sur le passage souterrain de l'avenue de Tokyo est long et étroit, il imposera donc les dimensions du bâtiment:162 x 22m. Il se compose d'une tour de 54 m de haut et d'un grand hall de 140 m de long. Speer raconte dans ses mémoires qu'il s'est trouvé "par hasard dans une pièce ou était les plans du pavillon de l'URSS"; suite à ce "hasard" il décida d'augmenter la hauteur de la tour prévue pour qu'elle domine le pavillon rival.
Le style du pavillon est néo classique et il est uniquement construit "de pierre et de fer allemands". C'est le plus coûteux de l'exposition.
"On peut résumer en peu de mots ce qui est exposé ici: il s'agit des plans et des croquis des grands travaux du Führer destinés à changer le caractère de la vie allemande ".
Dans cet esprit on pouvait voir de maquettes d'urbanisme dans l'entrée et sur l'estrade du fond: projet d'aménagement du terrain pour les journées du parti à Nuremberg, maison de l'art Allemand.de Munich, place Adolph Hitler de Weimar, station balnéaire "force par la joie" de Rugen et des ouvrages d'art des autoroutes allemandes.
L'Allemagne est tout de même avant tout une nation industrielle qui expose ses produits tel le Leica - premier 24x 36 compact - ou l'émetteur à ondes courtes Telefunken du Graf Zepelin, des équipements de TSF, l'oscillographe Siemens...
L'industrie chimique était bien représentée avec l'IG Farben, des tissus synthétiques, des colorants et le nouveau procédé de développement Agfacolor(5).
De façon assez inattendu après les autodafés de Nuremberg, une section spéciale était consacrée au livre Allemand(4).
Il y avait une section jouets avec les trains Markling, des jouets en bois et les poupées Kathe Kruse (5)
Citons aussi la pharmacie (Bayer), les pierres synthétiques, les instruments de musique, les métaux précieux, la verrerie, la porcelaine...
Il y avait un studio de télévision assurant la projection par ce que l'on appelle maintenant un vidéoprojecteur d'images d'un télécinéma ou d'une caméra située sur le toit(3).
Deux cabines de "phono-télévision" permettaient de dialoguer et de se voir à distance.
Une salle de cinéma avait au programme 77 films documentaires, 3 films scientifiques et 27 films à scénario.
Les films les plus marquants étaient sans doute "le triomphe de la volonté" (6), le compte-rendu des jeux olympiques de 36 et le film en couleur "Allemagne".
A l'occasion de soirées de gala on a a pu voir Leni Riefenstahl, Lida Barova, Mathias Wieman, Heinz Ruhmann, Leni Marhenach et Heli Finkenzeller
En dehors du pavillon officiel, l'Allemagne exposait au pavillon de la ville de Cologne, au pavillon international, à l'exposition des chemins de fer, au pavillon des Beaux Arts (7), à celui de l'éducation,...
La plupart des pavillons des 42 pays représentés sont de style moderne, "rationnel", mais les pavillons de l'Allemagne et de l'URSS situés part et d'autre de l'axe du palais de Chaillot affirment l'un le "réalisme socialiste", l'autre "l'art national socialiste"(1).
C'est une confrontation ou les deux adversaires adoptent finalement un style similaire.
Pour les visiteurs de l'expo, la confrontation Allemegne-URSS est pacifique |
La tour du pavillon allemand surmontée de l'aigle et de la Svastika Notez que la tour dessine le chiffre romain III. |
Au pied du pavillon allemand "Camaraderie" par Thorak Ce groupe est inspiré par les tyrannicides |
L'entrée du pavillon Allemand |
Le grand hall du pavillon Allemand |
Mercedes Daimler Benz Streamline Rennwagen. On en dérivera la W125 Rekordwagen qui atteindra 432 km/h sur l'autoroute Francfort - Darmstadt en 1938. |
L'exposition se double de soirées culturelles et de spectacles. Durant la semaine allemande du 9 au 12 septembre on a en outre: Le 9: chanson de Maurice Yvain sur la Seine. Le 10: Mille et une Nuits sur la Seine d'Arthur Honegger. et champoinnat du monde des poids et haltères. Le 11: course de hors-bords, suite du championnat. Le 12: fête de nuit, fête internationale du vin et du raisin, prix Royal-Oak . Spectacles allemands au théâtre des Champs Élysées. |
Le pavillon de L'URSS vu du pavillon allemand plus elevé |
L'ouvrier et la kolkhozienne avec au premier plan le groupe des nations de l'URSS |
Le groupe des nations de L'URSS de J Tchaikov fut transféré au château de Baillet où le syndicat de la métallurgie accueillait des camps de jeunesse. Sous l'occupation le groupe fut détruit et ses débris retrouvés dans l'ancienne glacière du parc en 2004 |
La section artistique avec le tableau de Guerassimov "Staline et les chefs" |
La maquette du palais des soviets avec sa statue de Lénine qui aurait culminé à 400m. Le principal architecte, Iofane, est celui du pavillon de l'URSS. Pour le construire on démolit la basilique du Christ Sauveur mais la guerre arriva. Les fondations servirent longtemps de piscine aux moscovites et on a maintenant reconstruit à l'identique la basilique |
Salle des transports |
L'exposition ouvre le 27 mai, le 20 juin Tchkalov réussit un raid entre Moscou et Vancouver via le pôle Nord. On installe immédiatement dans la salle des transports une maquette relatant l'exploit et un groupe sculpté de l'équipage |
Le pavillon Allemand
Son auteur n'est rien moins qu'Albert Speer qui sera un peu plus tard ministre des armements et de la production de guerre.L'emplacement retenu sur le passage souterrain de l'avenue de Tokyo est long et étroit, il imposera donc les dimensions du bâtiment:162 x 22m. Il se compose d'une tour de 54 m de haut et d'un grand hall de 140 m de long. Speer raconte dans ses mémoires qu'il s'est trouvé "par hasard dans une pièce ou était les plans du pavillon de l'URSS"; suite à ce "hasard" il décida d'augmenter la hauteur de la tour prévue pour qu'elle domine le pavillon rival.
Le style du pavillon est néo classique et il est uniquement construit "de pierre et de fer allemands". C'est le plus coûteux de l'exposition.
"On peut résumer en peu de mots ce qui est exposé ici: il s'agit des plans et des croquis des grands travaux du Führer destinés à changer le caractère de la vie allemande ".
Dans cet esprit on pouvait voir de maquettes d'urbanisme dans l'entrée et sur l'estrade du fond: projet d'aménagement du terrain pour les journées du parti à Nuremberg, maison de l'art Allemand.de Munich, place Adolph Hitler de Weimar, station balnéaire "force par la joie" de Rugen et des ouvrages d'art des autoroutes allemandes.
L'Allemagne est tout de même avant tout une nation industrielle qui expose ses produits tel le Leica - premier 24x 36 compact - ou l'émetteur à ondes courtes Telefunken du Graf Zepelin, des équipements de TSF, l'oscillographe Siemens...
L'industrie chimique était bien représentée avec l'IG Farben, des tissus synthétiques, des colorants et le nouveau procédé de développement Agfacolor(5).
De façon assez inattendu après les autodafés de Nuremberg, une section spéciale était consacrée au livre Allemand(4).
Il y avait une section jouets avec les trains Markling, des jouets en bois et les poupées Kathe Kruse (5)
Citons aussi la pharmacie (Bayer), les pierres synthétiques, les instruments de musique, les métaux précieux, la verrerie, la porcelaine...
Il y avait un studio de télévision assurant la projection par ce que l'on appelle maintenant un vidéoprojecteur d'images d'un télécinéma ou d'une caméra située sur le toit(3).
Deux cabines de "phono-télévision" permettaient de dialoguer et de se voir à distance.
Une salle de cinéma avait au programme 77 films documentaires, 3 films scientifiques et 27 films à scénario.
Les films les plus marquants étaient sans doute "le triomphe de la volonté" (6), le compte-rendu des jeux olympiques de 36 et le film en couleur "Allemagne".
A l'occasion de soirées de gala on a a pu voir Leni Riefenstahl, Lida Barova, Mathias Wieman, Heinz Ruhmann, Leni Marhenach et Heli Finkenzeller
En dehors du pavillon officiel, l'Allemagne exposait au pavillon de la ville de Cologne, au pavillon international, à l'exposition des chemins de fer, au pavillon des Beaux Arts (7), à celui de l'éducation,...
- E U 1937 Deutsche Abteilung p 7
- Image 375 lignes
- Il y était question de reliure et d'imprimerie mais aussi de livres bon marché comme la collection Issel
- Au contraire du Kodachrome l'Agfa Color n'exige qu'un bain de développement ce qui pouvait être réalisé par un amateur (NdR: à condition de maintenir scrupuleusement la température du bain)
- Film de leni Riefenstahl consacré aux journées du parti à Nuremberg en 1935 . Je trouve les premières images de l'arrivée de l'avion d'Hitler et des préparatifs extraordinaires sur le plan cinématographique.
- "Les Beaux Arts sont une affaire qui concerne le peuple tout entier, une affaire publique relevant du domaine de la politique d'Etat. Elle est l'expression visible de la conception Allemande du monde, elle est le miroir de l’âme allemande et par conséquent elle est unie au peuple... elle donne l'explication de l'effort de l'artiste vers le fini et la perfection" ( Dr Ruppel commissaire général Allemand)
Le pavillon de l'URSS
C'est le symétrique du pavillon Allemand avec des dimensions comparables: 160m x 21,5 m
L'architecte est Boris Iofan mais l'oeuvre majeure est évidemment le groupe de " l'ouvrier et la Kolkhozienne" de Moukhina .(1)
"Le style du pavillon soviétique porte l'empreinte incontestable de la méthode artistique que nous appelons réalisme socialiste.. La principale qualité du pavillon est la plénitude de son imagerie, la complétude idéologique" (2)
L'intérieur ne présentait pas, comme le pavillon Allemand, un hall unique mais 5 salles de hauteur décroissante.
Le contenu était beaucoup plus "politique" que celui du pavillon Allemand.
Dans le vestibule se trouvait deux vastes panneaux: 1917 - 1937
La première section était consacré à la présentation de l'URSS.
On avait une carte de 20 m² de l'URSS où chaque capitale des 11 états était représentée par un rubis étoilé avec son nom écrit en émeraudes.
La constitution Stalinienne de 36 "la plus démocratique du monde" était commentée et ses principaux articles gravés sur le socle d'un pilastre de marbre couronné par un médaillon représentant les profils de Lénine et de Staline.(3).
La deuxième section était consacrée à la science et à l'éducation avec un exposé des œuvres de Gorki et de Pouchkine.
La troisième section était consacrée à la peinture et à la sculpture
La quatrième section était celle des transports par terre, eau ou air.
La salle de cinéma projetait: cavalerie de l'armée rouge, député de la Baltique, Pierre le grand, la conquête du Pole nord.
Le théâtre des Champs Elysées donnait Liubov Yarovaia de Constantin Treniov, pièce ou l'héroïne trahit son mari pour le bien du parti.
- Toujours visible à Moscou au centre panrusse des expositions
- Pavillon SSR na Medjdoinarodmoï vystake v Parije 1938 p 4
- Le monument évoque pour moi l'aspect du code d'Hammurabi au Louvre. Romain Roland ajoutait que c'était "la constitution la plus humaine"
Ressemblances et dissemblances
Les deux pavillons partagent la même conception "totalitaire" de l'art.
Dans les deux cas il s'agit officiellement d'un "art populaire et national".
Au XX eme siècle on proclame la rupture avec le passé et parait l'idée de la dégénérescence de l'art due au capitalisme.
Cette conception mène d'abord les artistes dans des voies nouvelles mais Hitler et Staline vont imposer un art "directement compréhensible", un art au service de la propagande. (1)
En peinture le peuple n’apparaît que pour montrer son enthousiasme envers l'avenir radieux et la confiance en ses chefs. Il n'y a pratiquement pas de particularités nationales dans ces tableaux. (2)
En architecture il faut "faire grand" pour montrer la supériorité des nouveaux systèmes. Comme là aussi les bâtiments doivent être "directement compréhensibles" il faut éviter toute forme nouvelle et donc être néo-classique. Les deux pavillons ont tous deux une structure métallique mais elle est soigneusement cachée par des parements de pierre.
Les deux pavillons partagent un but commun: proclamer la supériorité du système politique de leur pays. Pour les soviétiques il s'agit purement de propagande mais pour les allemands il y a propagande et commerce.
Si les enveloppes des bâtiments sont assez semblables, les espaces intérieurs et les contenus sont très différents.
Le communisme a vocation à l'universalité et de toute manière l'URSS commerce peu avec les pays occidentaux: le pavillon sera donc consacré uniquement à la propagande.
L'intérieur du pavillon russe est "pédagogique": des salles successives doivent vous convaincre de l’intérêt du socialisme sous tous ces aspects.
L’idéologie nazie est particulière à la supériorité de la race allemande et les industriels allemands sont massivement exportateurs.
Le pavillon.doit présenter les industriels sur un pied d'égalité: il y aura donc un grand hall commercial, la propagande sera dans les maquettes (à l'entrée et au fond sur l'estrade) et dans les peintures murales.
Les deux pavillons eurent la médaille d'or de l'exposition.
A la New York World 's Fair, l'exposition universelle de 1939, l'Allemagne sera la seule grande nation à n'avoir pas de pavillon, l'URSS aura un pavillon pompeux avec la statue de l'ouvrier (sans la kolkhozienne) tenant une étoile au lieu d'un marteau.
Les deux pavillons eurent la médaille d'or de l'exposition.
- Après la révolution les artistes se tournèrent tout d'abord vers de nouvelles voies: futurisme, suprématisme,...
Le seul point commun entre ces mouvements et le réalisme socialiste, qui les balaya, est la notion de rupture avec le passé pour construire l'homme nouveau. Malevitch considérait "qu'un pas de vis abîmé était plus grave que la destruction de la basilique du Christ sauveur". - Les textes de propagande prétendent que l'art doit exalter "l’âme Allemande" (ou "l’âme Russe") mais les œuvres produites ont peu de caractéristiques "nationales". Au temps de la peinture académique il exista en Russie un courant, celui des ambulants, qui ne considérait pas le peuple comme un sujet anecdotique.
Sites et références
- L'art totalitaire: réalisme socialiste et art national socialiste
- Le pavillon de l'URSS ( histoire des statues), site des expositions universelles de Sylvain Georges
- L'exposition universelle de 1937 ( photos), site art nouveau
- Baldet (photos couleur de l'exposition)
- L'art du troisième Reich (en particulier le livre de photos stéréoscopiques de l'expo)
- Les expositions universelles de 1939
- L'Illustration (numéros sur l'exposition).
- Rapport général de l'exposition. Sections étrangères ( tomes 9 et 10)
- L'art totalitaire. Igor Colomstock, Carré 1991
- Grand Illusion. The third Reich, the Paris exposition... Karen Fiss, University of Chicago 2009
- Paris 1937. L'Exposition universelle (vues de l'exposition par un visiteur)
Le cinéma. Les affiches annoncent "Les marins de Cronstadt" et "Tchapaïev" |
Tout va bien, il y aura même des expositions universelles en 1939 et elles se poursuivront bien après le début de la guerre. |
Feu d'artifice de nuit éclairant le pavillon de l'Allemagne |
L'exposition est terminée, il reste quelques débris |